dix ans
Monday, July 18th, 2011, 10:53voilà, c’est terminé. la muse récursive, complétée hier soir, fera 318 pages bien tassées. c’est 18 de plus que les prévisions, un surplus pas trop déraisonnable (non?). il faut dire que vers la fin, je me suis laissé aller à faire des pages où il ne se passe pas grand-chose, juste pour le plaisir de laisser languir le récit un tout petit peu — comme un dernier tour de piste avant les adieux.
je vous donne le décompte des pages, ce n’est pas pour faire pleuvoir les bravos, certes le nombre est impressionnant, mais en même temps pas tant que ça: je ne suis pas le premier à faire un livre de cette ampleur-là, tant s’en faut. et puis, trois cent quelque pages sur dix ans, au fond ce n’est pas beaucoup. et puis ce sont des pages faites rapidement, autant que possible dans l’urgence, en y pensant le moins possible… sauf qu’en fait, en y pensant peut-être un peu trop. bref, vous voyez que ce n’est pas simple.
d’où vient ce projet-là? j’ai envie de dire: «de loin». j’avais 25 ans quand je l’ai commencé, mais la trame de l’histoire était plus ancienne encore (un début de récit avorté dont j’ai repris les éléments principaux). au fil du temps, j’y ai greffé pas mal de trucs, le résultat d’inventions, de réflexions, de choses de la vie et ainsi de suite. moi-même je changeais, je devenais tranquillement quelqu’un d’autre, mais cette histoire-là me suivait, pas le choix, aurait fallu la finir. j’y relis aujourd’hui des choses qui m’étonnent, qui m’embarassent, qui m’émeuvent parfois, qu’en tout cas je ne referais plus, que je regrette, parfois, de n’être plus en mesure de refaire.
et me voilà aujourd’hui, bien adulte, qui boucle un projet qui prend sa source dans une fin d’adolescence tardive. la longueur du projet — dix ans — laisse penser que j’y ai travaillé de manière constante (lente mais constante), or ce n’est pas du tout le cas. plutôt, j’ai eu une première phase de travail assidue d’un peu plus d’un an, puis une autre plus lente (pendant laquelle je travaillais aussi à d’autres livres, printemps lunaire et minerve). enfin, un grand trou où il ne se passa plus rien, sauf quelques pages, une fois de temps en temps, quand la honte me ramenait à ma table à dessin, honte de n’en pas finir, et je faisais une page, deux peut-être, et j’étais presque certain d’avoir retrouvé le rythme mais évidemment, dès le lendemain, je laissais tout ça en plan. je voulais faire n’importe quoi sauf la muse (c’est bien ce qui s’est passé, d’ailleurs; je n’ai pas chômé, après tout, j’ai fait autre chose).
il a fallu que se précise le projet d’édition de la mauvaise tête pour que je recommence à promettre une fin à ce livre inachevé. il a fallu aussi la gentille obstination de vincent et la patience de josiane. il a fallu le coup de pouce de périscopages. et puis il a fallu changer mon horaire de travail, apprivoiser le matin, réinvestir l’atelier commun où s’empoussièrait ma table à dessin. il a fallu encore le conseil de certains, qui m’ont amené à remplacer mes vieux feutres par la noble encre de chine, et par là: regain de plaisir au dessin, la petite poussée qu’il fallait encore…
il m’a fallu me remettre les idées en place: tant de personnages, tant de récits dans les récits — ça va partout et nulle part en même temps, il faut ressemeler mais pas trop, que ça reste à l’état de vieilles bottes usées. qu’à la fin, on ait l’impression de s’être fait raconter quelque chose.
je pense que ce sera un bon livre. mais vous savez comment c’est: après un temps, on ne voit plus ce qu’on fait, on avance et on espère seulement que ça ne soit pas trop mauvais.
il y aura des pages bancales et d’autres pas piquées des vers. des dialogues embarassants et d’autres finement ciselés. des dessins ratés et d’autres un peu moins.
malgré tout je pense que ça sera vivant, que ça respirera un peu le monde dans lequel on est, qu’on ne contrôle pas, qui veut nous dicter certaine conduite, certaine marche à suivre, qu’on choisit d’écouter, d’ignorer, de passer outre…
et puis de toute façon, il faudra faire avec, parce que maintenant que c’est fini, je n’y touche plus!
July 18th, 2011, 20h42
*ovulation debout*
July 19th, 2011, 9h36
http://randomoverload.com/wp-content/uploads/2011/05/1e4a0cb442f1d0b779e.jpg
July 19th, 2011, 11h03
au revoir, fin de siècle! ;)