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Wednesday, April 17th, 2002[cette critique est parue originellement sur le site bdparadisio]
hugues micol, 3 (cornélius)
Ce livre pourrait devenir, après le notoire (et très inspirant) Lapinot et les carottes de Patagonie de Trondheim, la deuxième “BD d’apprentissage” d’importance. Drôle de genre s’il en est, parce qu’il implique un auteur en train de faire sa griffe avec les moyens du bord, et que l’intrigue est souvent secondaire au conflit de l’auteur avec sa création. Avec 3 de Hugues Micol, pas de bulles ou de narratif, tout est dans le dessin et la façon dont le mouvement est représenté. L’histoire, assez indescriptible mais néanmoins très cohérente, ressemble à un film d’action de série B. Les dessins ne sont pas parfaits, mais sachant que tout ça a été dessiné au stylo et sans crayonné, je suis resté assez ébahi par l’efficacité de la mise en scène et la maîtrise graphique de Micol. J’ai été par contre un peu déçu que le récit ne comporte pas un peu plus de fantaisie; Micol semble souvent se cantonner dans certains clichés de genre, bien qu’il les mélange à plus mieux mieux. Alors, on est en Asie et en même temps aux Etats-Unis, c’est de l’horreur et du policier, on n’a aucune idée qui est le véritable truand (bah, on s’en fout!), et en mangeant un poisson bizarre, on se retrouve invincible et ailé. L’univers de l’auteur me laisse assez perplexe mais l’intérêt du livre à mon avis est autre. Lire 3 me fait penser à la BD en tant que médium, son potentiel et ses limites. malgré la comparaison ci-haut, 3 n’est sûrement pas aussi indispensable que Les carottes de Patagonie mais ceux comme moi qui s’intéressent à la BD de forme iconoclaste seront sûrement ravis par ce bouquin qui semble sortir de nulle part et partout à la fois.